Q12. Quel acte providentiel spécial, Dieu a-t-il exercé envers l’homme dans l’état dans lequel il a été créé ?
R12. Après avoir créé l’homme, Dieu a conclu une alliance de vie avec lui, sous condition d’obéissance parfaite, en lui interdisant de manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, sous peine de mort.
Ayant établi les principes de la création et de la providence, le Catéchisme nous introduit un « acte providentiel spécial, » que Dieu a exercé, à savoir la conclusion d’une alliance avec l’homme. Souvent, on l’appelle « L’Alliance des Œuvres » pour signifier la condition attachée à l’alliance. Ici, le catéchisme prend l’autre nom possible pour cette alliance, le nom qui signifie ce que l’alliance promettait, à savoir, la vie.
Mais il faut s’arrêter sur ce point-là. La bénédiction proposée n’est pas simplement le fait de ne pas mourir, de continuer dans le même état dans lequel l’homme a été créé. Par cette alliance, Dieu a mis l’homme dans une situation de probation par laquelle il pourrait avancer depuis son état que l’on appelle « l’état d’innocence » vers « l’état de gloire. » Il s’agit du sabbat, et une pleine communion avec Dieu — ce qui est au centre du sens d’être créé dans l’image de Dieu.
Autrement dit, quand on parle plus tard du salut, ou de la rédemption, il ne s’agit pas d’un retour au jardin, d’une simple restauration de ce paradis. Il s’agit d’un avancement à l’état proposé à Adam (mais non pas atteint par lui).
Bien qu’Adam se soit trouvé dans un monde très bon, il y avait la possibilité que l’homme pèche contre Dieu, il y avait la possibilité de la mort, il y avait un serpent à battre. Il fallait qu’Adam, par cette probation, confirme son désir d’obéir à Dieu et de protéger et de purifier le sanctuaire qu’était le jardin au moment de l’entrée du serpent. Et c’était l’interdiction de manger de l’arbre de la connaissance du bien et du mal au moment de la tentation qui aurait fait preuve de ce désir.
Une phrase souvent utilisée pour résumer cette idée (surtout trouvée dans l’enseignement de Geerhardus Vos), c’est « L’eschatologie précède la sotériologie. » Quand on parle de sotériologie, on parle de salut ; et l’eschatologie, c’est la fin en vue. Donc, par cette phrase, on veut dire que, même avant le moment où il était question de « sauver » l’homme, il était question de mener l’homme à une fin plus glorieuse que l’état d’innocence dans le jardin d’Eden. Donc même s’il n’y avait pas eu besoin de sotériologie (pas besoin de Sauveur), il y avait quand même de l’eschatologie (une fin plus loin en vue).
Or, il est plus que probable que, même si vous avez grandi dans l’église, vous n’avez jamais entendu l’histoire d’Eden décrite en ces termes-là. C’était mon cas jusqu’à mon arrivée à la faculté de Théologie, et j’ai pris un moment pour comprendre, mais une fois la Bible est comprise en ces termes-là, le reste de la Bible devient beaucoup plus facile à comprendre.
Je me souviens d’avoir demandé à un professeur où on trouve cette idée de probation en vue d’un avancement, et d’avoir reçu la réponse « Ben, dans le texte. » Il avait raison – mais il fallait me montrer où. Voici donc trois points clé qui m’ont aidé à mieux comprendre cette alliance de la vie.
1. L’Arbre de la Vie
Dans le jardin d’Eden, il y avait l’arbre de la vie (associé avec une rivière qui arrosait le jardin), qui représentait la vie proposée à Adam de manière sacramentale. Et à la fin de Genèse 3, il semble qu’Adam et Eve n’avaient pas encore pu manger de cet arbre, et la conséquence principale d’être expulsés du jardin d’Eden, c’était ne pas pouvoir acceder à cette arbre de la vie.
Il faudrait attendre la fin, et le salut accompli par Jésus, le deuxième et dernier Adam, pour accéder à l’arbre de la vie (Apoc. 2.7, 22.2, 14).
2. Le Sabbat
Au début de Genèse 2, on voit Dieu qui entre dans son repos. Il a complété une œuvre, et il entre dans son repos. Et la question implicite qui nous reste, c’est, comment l’homme peut-il entrer dans ce repos de Dieu ? Quelle est l’œuvre requise ? L’alliance de la vie était la réponse à cette question. Et suite à la rébellion d’Adam, la réponse est la même, mais cette fois-ci un autre Adam nous est proposé qui pourra obéir parfaitement pour nous.
C’est pourquoi l’Exode, qui typifie le salut en Jésus, est décrit en termes d’entrée dans le repos de Dieu. Et c’est donc pourquoi l’auteur de l’épître aux Hébreux parle dans Hébreux 3-4 du repos qui nous attend. La possibilité d’entrer dans le repos de Dieu — le repos que Dieu a entré dans Genèse 2 — est encore là, est nous est promise en Jésus-Christ.
3. Le Corps Spirituel
A la fin du chapitre 15 de 1 Corinthiens, Paul parle de la résurrection et compare deux types de corps. Le corps naturel (ou « le corps psychique »/ »le corps de l’âme), et le corps spirituel (ou « le corps pneumatique »/ »le corps de l’Esprit »). Dans les versets 42-44a, lorsque Paul parle du « corps de l’âme » il parle du corps qui meurt — le corps après la chute.
Mais au verset 45, Paul élargi cette catégorie du « corps de l’âme » en l’associant avec le corps d’Adam avant la chute, par son allusion à Genèse 2.7: « Le premier homme, Adam, devint un être vivant (lit. une âme vivante). Le dernier Adam est devenu Esprit vivifiant. »
En gros, Adam veut dire que lorsque l’on compare le corps d’Adam après la chute et le corps Jésus après la résurrection, il a bien évidemment une différence énorme. Mais aussi, même si on compare Adam avant la chute, et Jésus après la résurrection, on a quasiment la même différence entre les deux. En comparaison avec le Christ ressuscité, même le corps pré-chute d’Adam apparaît relativement mort.
Paul dit encore plus — il nous reste le verset 44b: « S’il y a un corps naturel, il y a aussi un corps spirituel. » C’est-à-dire, même au moment de la création du corps naturel d’Adam, c’était en vue de le transformer en corps spirituel. Le corps naturel était toujours provisoire.
Geerhardus Vos l’exprime ainsi, dans ce que mes profs appelaient souvent « la note de bas de page la plus importante dans toute la littérature réformée » :
« L’Apôtre voulait montrer que, dans le plan de Dieu, il était envisagé, dès le début, une sorte de corps supérieure à notre existence actuelle. Du corps anormal du péché, aucune inférence ne peut être tirée quant à l’existence d’une autre sorte de corps. L’anormal est l’eschatologique ne sont pas si logiquement corrélés que l’un puisse être postulé de l’autre. Mais le monde de la création et le monde de l’eschatologie sont corrélés ainsi, l’un pointe vers l’autre ; sur le principe de la typologie, le premier Adam préfigure le deuxième Adam, le corps psychique préfigure le corps pneumatique. »
— Geerhardus Vos, « The Eschatological Aspect of the Pauline Conception of the Spirit » dans « Redemptive History and Biblical Interpretation »
Bien sûr, on connait l’histoire, Adam n’a pas obéi à Dieu parfaitement. Il a choisi plutot de se rebeller contre lui. Et c’est ce que l’on verra dans les questions qui suivent. Mais ce principe que l’eschatologie précède la sotériologie nous aidera beaucoup à comprendre ce que l’on apprend plus tard par rapport à notre salut.